Kurban Bayramı, Istanbul 2014

Loin de se résumer à un modèle rituel uniforme et immuable, la pratique du kurban connaît des recompositions multiples, traduisant l’enchevêtrement de différentes économies morales et d’enjeux touchant tout autant à l’accomplissement du rituel proprement dit qu’à sa place dans l’espace public. Classiquement appréhendé au prisme de la pratique familiale et de l’universalisme musulman, le rituel voit de multiples attributions de signification, parfois plurielles sinon contradictoires, tandis que ses modalités d’accomplissement semblent changer également. Dans le cadre d’un projet impliquant d’autres terrains de recherche, les enquêtes conduites à Istanbul ont permis d’explorer différentes directions : les lieux et les images du Bayram telles que diffusées dans l’espace médiatique et l’espace public (presse, sites internet, télévision, mais aussi publicité), autour des différents discours (célébration, critique, etc.) mais aussi visant à saisir l’espace urbain et l’événement rituel l’un par l’autre. L’humanitarisation de la pratique du kurban via les multiples ONG confessionnelles qui font des appels aux dons spécifiques à l’occasion du Bayram : objet d’un discours fort structuré et transversal, à l’intersection du sacré et de l’humanitaire, le rituel devient vecteur d’« expérience humaine » autant que de transfert de normes (développementalisme, prosélytisme). L’environnement « non religieux » stricto sensu du kurban, à l’instar des dimensions sanitaires et vétérinaires (hygiénisation mais aussi contrôle) et des formes de commercialisation du kurban, permettant d’analyser l’alliance du religieux et des pratiques de consommation. (Olivier Givre – Université Lumière Lyon II – UMR EVS-CREA)